
Bal guinguette et très haute définition
Le Bal du moulin de la Galette : dans les coulisses du shooting gigapixel.
Le mois d’août touche à sa fin, et la circulation Quai Anatole France est encore fluide pour quelque temps. Comme tous les lundis, le musée d’Orsay est fermé. La tranquillité inhabituelle qui règne permet le déroulement d’opérations totalement incompatible avec la présence du public. La reproduction en très haute définition d’un chef d’œuvre d’Auguste Renoir est un de ces « chantiers ». L’objectif annoncé de la prise de vue est l’obtention d’un fichier de plus de 500 millions de Pixel.
Je retrouve Mathieu Rabeau en plein réglage de sa rotule. Aucun rapport avec de l’orthopédie : il est question de l’indispensable accessoire qui permet de réaliser plusieurs prises de vue qui s’assembleront parfaitement en post-production. Pour obtenir ces définitions de plusieurs centaines de millions de pixels, on détaille le tableau en plusieurs lignes et colonnes de photographies, qui une fois assemblées ne formeront plus qu’un seul et même fichier géant. Le photographe effectue ses réglages avec une minutie extrême, car si la moindre étape n’est pas exactement réalisée, le fichier ne pourra tout simplement pas être assemblé, une fois de retour à l’agence.
Aligner la plaque d’attache rapide avec l’axe optique, caler l’axe optique sur l’axe de rotation de la rotule, soulager la monture de l’objectif en fixant l’appareil à la rotule sur deux points… toutes ces opérations ésotériques une fois réalisées, le travail de Mathieu, assisté ce jour-là par Léopoldine, est encore loin d’être fini. Il doit encore définir rigoureusement son point de vue, concevoir un éclairage qui permette de solutionner les problèmes posés par la vitre protégeant l’oeuvre. Après cela, il devra aussi configurer CaptureOne, le logiciel de prise de vue professionnelle qu’utilisent tous les photographes de l’agence, de manière à assurer la reproduction des couleurs avec une très grande fidélité. Cette problématique est pour le moins centrale lorsque la mission consiste à photographier des chefs-d’œuvre de la peinture. Par soucis de brièveté, la description du processus n’est pas exhaustive : bien d’autres étapes tout aussi rigoureuses sont nécessaires à l’aboutissement de ce projet.
Cet été, plusieurs chefs-d’œuvre du Musée d’Orsay ont été photographiés en employant cette technique exigeante. Les résultats sont à la hauteur des efforts déployés : une fois la post-production réalisée, parcourir un fichier de cette qualité, et se perdre dans les détails et les coups de brosse de l’artiste, offre toujours le même plaisir enfantin. L’autre tentation encore un peu plus puérile, mais si satisfaisante, consiste à compter le nombre total de pixels obtenus… ici un milliard cinq cent dix-neuf millions sept cent quatre-vingt mille huit cent trente pixels.
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